L’Ukraine plonge la Russie dans le " brouillard de la guerre " pour réussir sa contre-offensive

May 06, 2023
349 views

Sur cette photographie fournie par une agence étatique russe, de la fumée s’échappe d’un dépôt de pétrole de Volna (Russie), le 3 mai 2023. ROMAN SOKOLOV / TASS / SIPA USA

Les militaires appellent cela le « brouillard de la guerre ». Théorisée au début du XIXe siècle par le général prussien Carl von Clausewitz, cette expression désigne, lors des conflits armés, le flou volontairement entretenu par les belligérants sur leurs forces, leurs positions ou encore leurs objectifs. « Le brouillard est la condition structurelle de la guerre. On le provoque pour assurer la sûreté de ses opérations. Et les Ukrainiens sont très doués à ce jeu-là », explique Joseph Henrotin, chargé de recherche au Centre d’analyse et de prévision des risques internationaux, et rédacteur en chef du magazine Défense & sécurité internationale.

Alors que Kiev annonce depuis le début du printemps l’imminence d’une contre-offensive de ses troupes contre l’ennemi russe, l’armée ukrainienne multiplie les opérations destinées à épaissir ce brouillard. De nombreuses attaques de drones ont été répertoriées ces derniers jours sur des positions situées dans les territoires ukrainiens occupés mais aussi en Russie.

Le 29 avril, une frappe a provoqué un gigantesque incendie dans un dépôt de carburant du port de Sébastopol, quartier général de la flotte russe de la mer Noire. Le 2 mai, un autre site pétrolier a pris feu dans le village russe de Volna, proche de la Crimée. Le 4 mai, une explosion a touché une raffinerie de pétrole à Ilsky, dans la région russe de Krasnodar.

Les opérations de sabotage s’accélèrent également. Les 1er et 2 mai, deux trains de marchandises ont déraillé dans la région russe de Briansk, non loin de la frontière avec l’Ukraine, après avoir été touchés par des engins explosifs. Lundi, une ligne électrique près d’un village situé au sud de Saint-Pétersbourg a été endommagée. Le service fédéral de sécurité russe (FSB) a par ailleurs annoncé avoir démantelé un réseau de partisans ukrainiens « qui prévoyait de commettre une série d’actes importants de sabotage et de terrorisme en Crimée », selon un communiqué publié le 3 mai. Sept personnes auraient été arrêtées.

Quasi-aveuglement russe

De la même façon, les forces ukrainiennes mènent depuis la mi-avril d’innombrables petites attaques tout au long des 1 800 kilomètres de front, du delta du Dniepr à la région de Koupiansk, en passant par celles d’Orikhiv ou de Pavlivka.

Prises isolément, ces actions n’ont pas d’effet stratégique ou même opératif, mais leur dispersion les rend difficiles à interpréter pour Moscou. « Les Ukrainiens tapent aussi bien au nord qu’au sud ou à l’est, ce qui impose des dilemmes à l’état-major russe. Soit celui-ci choisit de tout défendre, au risque d’être faible partout, soit il concentre ses forces à certains endroits, ce qui en laisse d’autres vulnérables », explique M. Henrotin.

Il vous reste 64.1% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source: Le Monde