Cac 40 : Pourquoi les petites valeurs font moins bien que le CAC 40 depuis plusieurs années
(BFM Bourse) - A l'exception de 2020, le CAC Mid & Small sous-performe nettement le CAC 40 depuis 2018. Les petites valeurs souffrent d'une conjoncture défavorable et d'un mouvement de décollecte, tandis que le CAC 40 a bénéficié de la forme étincelante des valeurs du luxe.
Ce sont des valeurs pour qui le marché est censé représenter un important relai de financement et qui sont pourtant à la peine: les petites et moyennes capitalisations.
Comme le montre le graphe ci-dessous, ces titres souffrent, depuis 2018 de la comparaison avec les grands noms de la place parisienne. Ainsi, l'indice CAC Mid & Small a – à l'exception de 2020 – sous-performé chaque année le CAC 40. Ce qui est encore le cas en ce début 2023, le baromètre phare de la place de Paris prenant plus de 15,35% (*) depuis le 1er janvier contre à peine 5,15% pour le CAC Mid & Small. Une sous-performance qui s'explique en partie par la vigueur du luxe sur le CAC 40, un secteur très peu présent sur les plus petites capitalisations. Mais, sur le long terme, de nombreuses autres raisons existent.
"La sous-performance des petites et moyennes valeurs survient après des années de surperformance par rapport au CAC 40. Durant cette période, ces titres ont bénéficié de leurs taux de croissance des bénéfices structurellement bien plus forts, de l'ordre de 15% à 20% par an. Il est plus simple de dégager ces taux quand vous êtes une PME qu'une grande entreprise, qui est considérée plus comme un paquebot, certes résistant aux tempêtes mais plus lent à manier dans les périodes de reprise", explique Vincent Le Sann, directeur général adjoint de Portzamparc.
"Il faut remonter depuis plusieurs années [pour constater cette sous-performance, NDLR], depuis que les risques de récession sont apparus, en 2018", a, de son côté, constaté Julien Fauvel, gérant chez Talence Gestion, fin avril, sur BFM Business.
"Le tournant c'est juin-juillet 2018, c'est là que le marché s'est retourné, avec des valorisations des petites et moyennes entreprises qui étaient alors très élevées", complète Pascal Quiry, professeur de finance à HEC et co-auteur de la lettre d'informations boursières Vernimmen.
Une vague de décollecte
Les plus petites valeurs sont pénalisées par leur faible liquidité, elle-même conséquence d'une décollecte importante qui a eu lieu ces dernières années.
"Depuis 2018, il y a tout d'abord eu des prises de bénéfices sur ces valeurs. Et, à compter de 2019, de la décollecte au niveau des fonds spécialisés dans les petites et moyennes capitalisations (on en compte environ 200 en France)", rappelle Vincent Le Sann.
"Cette décollecte a créé une forme de cercle vicieux. Les moyennes et petites capitalisations sont caractérisées par une liquidité plus réduite. Lorsque vous mettez sur ce marché un paquet d'actions à la vente vous n'avez pas beaucoup d'acheteurs en face, cela crée un mouvement mécanique de baisse. La décollecte entraîne ainsi la chute de ce marché des petites valeurs qui elle-même au travers des performances moins bonnes alimente un peu plus la décollecte. C'est une spirale négative dont nous peinons à sortir", détaille le spécialiste.
L'autre grand coup de bambou est dû au contexte économique moins favorable. "Dès que la conjoncture se dégrade, le marché revient sur les grandes valeurs. Le Covid, l'inflation, tous ces éléments plombent les petites et moyennes capitalisations car ces sociétés souffrent, en moyenne, plus que les grandes lorsque l'économie perd en vitesse", souligne Pascal Quiry.
"Il y a également eu une perception du risque plus important. Les dernières années ont été marquées par la crise sanitaire, le conflit en Ukraine et le ralentissement économique mondial. Tous ces évènements macroéconomiques pénalisent par essence les moyennes et petites capitalisations, car les investisseurs privilégient dans ce contexte les plus grands groupes. L'idée est que le paquebot survivra toujours à la tempête là où le petit moteur risque d'être emporté par une vague", abonde Vincent Le Sann.
Un mouvement qui risque de durer
La vague d'introduction en Bourse sur la cote parisienne qui est survenue depuis 2018, avec en grande partie des petites sociétés, a pu également jouer. "On peut noter que sur les trois dernières beaucoup d'IPO [introductions en Bourse, NDLR]" sont survenues et "beaucoup de sociétés ont profité d'une fenêtre pour exprimer une valorisation élevée", note Julien Fauvel. "Par définition on a un retour à la normale dans une phase de hausses de taux", ajoute le gérant.
"Si l'on regarde les introductions en Bourse survenues ces dernières années, les 5/6e des entreprises évoluent sous leurs cours d'introduction ce qui tend à démontrer qu'elles étaient entrées sur la cote à un prix trop élevé. Et plus vous êtres petits, plus la probabilité de connaître une baisse après l'introduction est importante", précise Pascal Quiry.
Que faut-il pour que la tendance se renverse et que les petites et moyennes capitalisations retrouvent de l'allant en Bourse? "Il faut que l'économie soit meilleure et moins instable, moins imprévisible. Cela prendra probablement du temps, ce n'est pas pour demain", juge Pascal Quiry.
"Tout sera lié à la perception du cycle économique et donc d'un rebond de la conjoncture. A partir du moment où la reprise économique sera perceptible, les petites et moyennes capitalisations se remettront à surperformer et on pourra passer d'un cercle vicieux à un cercle vertueux, avec un retour de la collecte", confirme Vincent Le Sann.
(*)Variation arrêtée vendredi à 12h
Source: BFM Bourse