Mort de Grace Bumbry, cantatrice magnétique à la voix de velours
La cantatrice américaine Grace Bumbry, en mars 1982, à New York (Etats-Unis). SUZANNE VLAMIS/AP
Elle avait l’aura et tous les attributs d’une star : un glamour insolent, une présence magnétique sur scène et un tempérament volcanique. Et, surtout, la voix du bon Dieu. Une voix somptueuse, de velours sombre et d’airain, dotée d’une projection puissante, aux aigus percutants, aux graves profonds, qui lui aura permis d’incarner, notamment, les grands rôles verdiens, qu’elle a marqués de son empreinte dramatique, bouleversant l’histoire de l’art lyrique au XXe siècle.
La cantatrice américaine Grace Bumbry avait été victime, en octobre 2022, d’un accident vasculaire cérébral : elle s’est éteinte le 7 mai, à l’âge de 86 ans, dans un hôpital de Vienne (Autriche), sa ville d’adoption après des années passées en Suisse, près de Lugano.
Issue de la classe moyenne, Grace Melzia Ann Bumbry est née le 4 janvier 1937 à Saint Louis (Missouri). Son père, Benjamin Bumbry, est manutentionnaire au chemin de fer Cotton Belt ; sa mère, Melzia Walker, une institutrice qui aurait aimé être chanteuse. Toute la famille pratique la musique et chante dans la chorale de l’église méthodiste. A 7 ans, elle commence à étudier le piano, puis participe à un groupe vocal a cappella, tout en prenant des cours de chant avec le professeur de musique de son école.
Ses premières performances en tant que soliste ont lieu dans des productions scolaires du Messie, de Haendel, à la Charles H. Sumner High School de sa ville natale. A 12 ans, elle a rejoint la chorale méthodiste locale, et rêve de devenir chanteuse, à l’instar de la contralto Marian Anderson (1897-1993), que la jeune Bumbry a découverte en concert à 10 ans et dont elle écoutait chaque enregistrement et émission de radio.
Après avoir obtenu son diplôme en 1954, la jeune fille remporte un concours de jeunes talents parrainé par la station de radio locale KMOX. Le prix comprend une bourse d’études à l’Institut de musique de Saint Louis, qui la refuse parce qu’elle est noire. Les organisateurs s’arrangent toutefois pour qu’elle participe, plus tard, à l’émission télévisée d’Arthur Godfrey « Talent Scouts ». Grace Bumbry y interprète le périlleux O don fatale du Don Carlo, de Verdi, qui sera diffusé à l’échelle nationale. Un événement qui lui ouvrira les portes du College of Fine Arts de l’université de Boston (Massachusetts).
La première Afro-Américaine à Bayreuth
Après une audition à titre privé, la chanteuse a également été adoubée par Marian Anderson, qui loue sa « voix magnifique d’une grande beauté ». En 1955, dotée d’une bourse, Grace Bumbry part donc se perfectionner à Boston puis à la Northwestern University (Illinois), où la grande soprano allemande naturalisée américaine Lotte Lehmann (1888-1976) donne des master class. Impressionnée, celle-ci l’invite dans son Académie de musique de l’Ouest, à Santa Barbara (Californie). Elle deviendra son mentor et lui fera travailler les rôles de mezzo dans lesquels la future diva s’illustrera, alors même qu’elle se revendique soprano.
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Source: Le Monde