La chaîne CNN critiquée après avoir réservé un accueil privilégié à Donald Trump

May 12, 2023
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Des journalistes assistent à une réunion publique de CNN avec l’ancien président des Etats-Unis et candidat à l’élection présidentielle de 2024, Donald Trump, à Manchester (New Hampshire), le 10 mai 2023. JOSEPH PREZIOSO / AFP

Donald Trump ne souhaite pas la victoire militaire de l’Ukraine. Il mise sur un défaut financier des Etats-Unis afin d’embarrasser Joe Biden. S’il était réélu président en 2024, il gracierait une bonne partie des personnes condamnées pour l’assaut du 6 janvier 2021 contre le Capitole, « une journée magnifique ». Enfin, Donald Trump continue de se moquer grassement de la femme qui vient d’obtenir sa condamnation au civil pour agression sexuelle. Ainsi se résume l’émission de soixante-dix minutes, organisée en prime time par la chaîne CNN avec le favori des primaires républicaines, le mercredi 10 mai.

Un retour inédit sur cette antenne depuis sept ans, dont il peut se réjouir. Aucune révélation, aucune surprise, si ce n’est une : la complaisance de la chaîne, malgré la couverture controversée de deux campagnes présidentielles, la tentative de coup d’Etat de l’ex-président après sa défaite contre Joe Biden et ses allégations toujours fantaisistes sur des fraudes électorales. CNN a cédé au spectacle, en se drapant dans l’information. « On se croyait à nouveau en 2016 », lors de la première candidature de Donald Trump, a écrit le propre spécialiste médias de la chaîne, Oliver Darcy.

Dès la fin de l’émission, les critiques se sont abattues. Elles portaient moins sur les propos de l’ancien dirigeant que sur le dispositif accepté par la chaîne. Il s’agissait d’un « town hall », un jeu de question-réponse avec un public composé cette fois exclusivement de partisans de Donald Trump. Toutes ses outrances étaient saluées. Le reste du dispositif en devenait secondaire : Donald Trump obtenait, gratuitement, une longue séquence d’autopromotion. Même si elle ne risque pas de changer la donne politique et émeut surtout le petit cercle des commentateurs, nul doute que les autres candidats à la primaire rêveraient d’un traitement similaire.

Fausse victoire

Pour animer, relancer et contredire, la chaîne avait choisi sa vedette montante, la journaliste Kaitlan Collins. Celle-ci a souvent tenté de corriger les mensonges de son invité, mais elle a été au final ensevelie sous son mépris. Tandis que Donald Trump la qualifiait de « personne méchante », le public, lui, gloussait. « Ce soir, Kaitlan Collins a incarné ce que cela signifie d’être un journaliste de classe internationale », a prétendu CNN dans un communiqué.

Hors micro, les propres journalistes de CNN se lamentaient sur le désastre attendu, tandis que la direction défendait la nécessité d’un pluralisme. « Ce public qui vous a tellement dérangé, c’est un échantillon de près de la moitié du pays », a souligné le présentateur Anderson Cooper. Reconnaissant que la tâche de Kaitlan Collins était impossible, il a néanmoins justifié l’émission par l’avance du candidat dans les sondages. « Vous avez toutes les raisons d’être scandalisé et en colère aujourd’hui, et de ne plus jamais regarder cette chaîne. Mais pensez-vous que le fait de rester dans votre silo et de n’écouter que des gens avec lesquels vous êtes d’accord va faire disparaître cette personne ? »

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Source: Le Monde