En Turquie, Erdogan en position de force avant un probable second tour

May 15, 2023
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FactuelLe chef d’Etat sortant, qui était devancé dans les sondages par son adversaire, Kemal Kiliçdaroglu, sort finalement en tête du premier tour de la présidentielle. Avec 49,4 % des suffrages, il est en mesure de décrocher un troisième mandat d’affilée.

La journée a commencé dans le calme et sous un beau soleil de printemps, elle s’est terminée dans la confusion et la nuit la plus noire. Il a fallu attendre près de minuit pour se rendre à cette double évidence : pour la première fois de sa carrière, le président sortant Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis vingt ans, n’a pas remporté l’élection dès le premier tour, recueillant 49,4 % des suffrages. Son adversaire Kemal Kiliçdaroglu, contrairement aux prévisions de la quasi-totalité des sondages qui le donnaient en tête ces dernières semaines, arrive en deuxième position, avec 45 %. Un second tour aura donc lieu le 28 mai.

Cette élection est déterminante pour savoir non seulement qui dirigera la Turquie, mais aussi quelle sera l’orientation de politique étrangère de cette puissance régionale de 85 millions d’habitants, notamment dans ses relations avec ses alliés traditionnels et avec la Russie.

Les résultats disent à quel point la Turquie est polarisée. M. Erdogan se présente en position de force au second tour, alors que les résultats préliminaires des élections législatives qui se sont déroulées le même jour donnent à l’alliance au pouvoir – le Parti de la justice et du développement (AKP) et son allié, le Parti de l’action nationaliste (MHP) – une majorité parlementaire.

Le MHP, la formation d’extrême droite de Devlet Bahceli, l’allié indispensable d’Erdogan, a visiblement fait le plein de ses voix, contrairement à ce qu’avaient annoncé la plupart des sondages et enquêtes de terrains. Par ailleurs, l’alliance au pouvoir a fait mieux que ce à quoi on pouvait s’attendre dans les régions touchées par le tremblement de terre en février, atteignant même des résultats extrêmement élevés dans les villes de Kahramanmaras, Gaziantep et la région du Hatay.

Des partisans du président turc sortant Recep Tayyip Erdogan devant le siège de l’AKP, à Istanbul (Turquie), le 14 mai 2023. FRANCISCO SECO / AP

Pour expliquer la résistance inattendue du champion de l’islamo-conservatisme, plusieurs raisons sont avancées. Soner Çagaptay, expert de la Turquie au Washington Institute, estime que les musulmans conservateurs ont pu avoir, malgré ce qui a pu être dit et écrit, des réserves à voter pour un candidat comme Kemal Kiliçdaroglu, qui a revendiqué son alévisme, un courant religieux turc minoritaire, hétérodoxe et longtemps stigmatisé. La force indéniable d’Erdogan, qui a maintes fois démontré son habileté à utiliser les ressources de l’Etat à son avantage, a sûrement joué aussi. Le chef de l’Etat s’est doté d’un vaste réseau d’influence dans le secteur des entreprises, créant des liens de clientélisme et de dépendance importants, d’autant plus vitaux dans certaines régions que la situation économique et sociale y est préoccupante.

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Source: Le Monde