Tariq Ramadan affronte un premier procès pour viol à Genève
Tariq Ramadan, au Palais de justice de Paris, le 13 février 2020. THOMAS SAMSON / AFP
La première confrontation publique entre Tariq Ramadan et l’une de ses accusatrices s’ouvre, lundi 15 mai, devant le tribunal correctionnel de Genève. Selon l’acte d’accusation, l’islamologue se serait rendu coupable de viol « à trois reprises » et de « contrainte sexuelle » (fellation) durant la même nuit du 28 au 29 octobre 2008, dans un hôtel de Genève. Il encourt de deux à dix ans de prison. Son procès a été ordonné par le parquet suisse, à la suite d’une plainte déposée en avril 2018.
La plaignante, R. A. D., surnommée « Brigitte » dans la presse, est une Suissesse convertie à l’islam, qui avait rencontré Tariq Ramadan dix ans plus tôt, lors d’une séance de dédicaces, puis d’une conférence. Alors âgée d’une quarantaine d’années, cette mère de famille avait entretenu pendant quelques mois une correspondance via MSN et Facebook avec lui, avant de le rejoindre en octobre 2008 à l’hôtel où il séjournait. Il aurait saisi un prétexte pour l’entraîner dans sa chambre et lui aurait fait subir des actes sexuels d’une très grande violence, accompagnés de gifles et d’insultes.
L’enquête suisse s’est ouverte à l’automne 2018 alors que Tariq Ramadan était en détention provisoire en France, dans le cadre de deux autres affaires de viol (il a été incarcéré pendant neuf mois du 2 février au 15 novembre 2018). Sa première audition par le procureur suisse Adrian Holloway, retardée tant par le confinement que par la lenteur de la coopération entre les deux pays, n’a eu lieu que deux ans plus tard, en juillet 2020, au palais de justice de Paris, le contrôle judiciaire imposé à l’islamologue après sa remise en liberté lui interdisant de quitter le territoire national.
En septembre, puis en octobre 2020, Tariq Ramadan a été confronté à la plaignante, toujours à Paris. Deux longues journées pendant lesquelles R. A. D. a maintenu ses accusations, Tariq Ramadan dénonçant des « mensonges » et des « affabulations ». Il n’a reconnu, pour sa part, que des « caresses consenties » et a produit pour sa défense des messages de son accusatrice avant et après leur rencontre à l’hôtel. Selon l’une de ses avocates suisses, Me Yaël Hayat, cette confrontation avait aussi permis de révéler les « liens étroits » entretenus par la plaignante avec d’autres femmes mettant en cause son client. Des contacts qui, selon elle, traduisaient une volonté concertée de « mettre cet homme à terre ».
Climat « de menaces et de peur »
Parmi les charges qui seront débattues devant le tribunal correctionnel, figurent les attestations et les notes de deux psychiatres qui ont suivi R. A. D., dont l’un consulté dans l’urgence au lendemain de cette nuit d’octobre 2008. « Tariq Ramadan l’a croisée deux fois, rencontrée un soir et démolie dans la nuit », résume l’avocat François Zimeray, en soulignant le climat « de menaces et de peur » dans lequel vit sa cliente. Le parquet suisse a également obtenu le versement d’une partie de la procédure française, notamment les procès-verbaux d’audition de deux premières plaignantes françaises, dont Henda Ayari, décrivant des violences sexuelles similaires de la part de Tariq Ramadan. Autant d’éléments qui, selon l’accusation, confortent le récit de R. A. D..
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Source: Le Monde