Le marché du bio plonge dans une crise profonde

June 01, 2023
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AUREL

« Nous sommes touchés de plein fouet par la crise. A l’automne 2022, nous avons décidé collectivement de mettre des quotas de production, et de baisser nos volumes de 20 % », témoigne Jérôme Jacob, éleveur porcin à Quimper (Finistère) et président du groupement Bretagne Viande Bio (BVB) qui fédère 24 éleveurs porcins. Le plus dur, raconte-t-il, a été de refuser d’ouvrir le cercle à un agriculteur nouvellement converti au bio. « Il a fallu lui dire que nous devions choisir entre lui ou tout le groupe d’éleveurs. En le laissant sur le carreau, on se préservait », ajoute-t-il. M. Jacob explique aussi qu’une agricultrice affiliée à BVB a été contrainte d’abandonner la certification bio.

Cet exemple illustre la crise aiguë que traverse l’agriculture biologique. Une situation à mettre en lien avec la brutale décélération de la consommation des Français. Si les signaux de ralentissement étaient déjà perceptibles en 2021, ils se sont accentués en 2022. « Près de 600 millions d’euros se sont évaporés en un an, et le marché du bio est redescendu à 12,076 milliards d’euros », affirme Laure Verdeau, directrice de l’Agence bio, structure publique chargée de l’animation de l’écosystème du bio. « Résultat, la part du bio dans l’alimentation des Français est passée de 6,4 % à 6 % », regrette-t-elle.

Selon les chiffres publiés jeudi 1er juin par l’Agence bio, les Français ont mis moins de produits estampillés de la fleur blanche sur fond vert dans leur panier en faisant leurs courses dans les supermarchés. Le repli des ventes dans la grande distribution atteint 4,6 %. Les grandes enseignes restent toutefois le premier canal de commercialisation du bio, avec 53 % du total.

Déclassement en conventionnel

Les clients fidèles des magasins spécialisés comme Biocoop ou La Vie claire ont aussi regardé à la dépense. Ils ont déboursé 8,6 % de moins dans ces enseignes. Autre mauvaise nouvelle, la part de l’alimentation bio dans la restauration, déjà réduite à la portion congrue, s’est encore amenuisée, passant de 2 % à 1 %. Les seuls points positifs, mis en exergue par l’Agence bio dans son bilan annuel, sont la bonne tenue de la vente directe, qui progresse de 3,9 %, et les gains de part de marché dans la restauration collective, avec une hausse de 18 %. Mais cela ne permet pas de pallier le trou d’air du marché.

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Cette brutale décélération, particulièrement sensible en 2022, après des années de croissance à deux chiffres, a pris l’ensemble des acteurs du bio à contre-pied. Toutes les filières, œufs, lait, porc, fruits et légumes comme céréales, s’en trouvent bousculées. « Nous sommes passés d’une production de 630 millions à 1,3 milliard de litres de lait en cinq ans », souligne Nathalie Delagnes, éleveuse dans l’Aveyron avec 50 vaches laitières et présidente de la coopérative Biolait, qui collecte sur l’ensemble du territoire national.

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Source: Le Monde