Nos choix de lecture : " La Maison ", " Conte de fées ", " Poète à New York ", " Un merveilleux souvenir "…
LA LISTE DE LA MATINALE
Cette semaine, nous recommandons la lecture d’un fascinant récit inédit de l’auteur du Rivage des Syrtes, Julien Gracq ; du nouveau roman de l’incontournable Stephen King, un conte pour aujourd’hui ; de l’essai de Danny Trom, qui analyse le développement de l’idée d’« Etat des juifs », des débuts du sionisme à nos jours ; d’une nouvelle édition de ce qui est sans doute le chef-d’œuvre de Federico Garcia Lorca, Poète à New York ; et de la nouvelle autofiction de Marc Pautrel.
RÉCIT. « La Maison », de Julien Gracq
Agrégé de géographie, Julien Gracq (1910-2007) cherchait « à matérialiser l’espace ». La Maison, quatrième inédit publié depuis sa mort, se déploie à l’intérieur d’une friche. Sur la « terre » qui borde la route, lors de ses voyages en car entre « A. » et « M. », le narrateur est fasciné par une maison « trop haute pour sa largeur », qu’il peine à discerner à travers les sous-bois. A la racine de la sensation, sorti du bus dans une flânerie devenue « enquête de police », il tente de faire émerger la bâtisse de ce « fouillis hirsute ». Dans un mouvement inverse de distanciation et d’imprégnation, l’objet de désir est d’autant plus sacralisé qu’il est enclos dans ce « pire coin de campagne ».
Au cœur des bois embués de pluie, la villa se fait attendre, préfigurée par des annonciations – un coup de feu, qui fait affleurer une réminiscence de la guerre, le pépiement d’un oiseau : avant de se donner aux yeux de l’homme qui marche, cette « maison où se pendre » se fait entendre, entre absence et présence.
Quand le chant d’une femme le tient « plusieurs minutes immobiles », le pluriel de l’adjectif se fait promesse – ce n’est plus le personnage qui est figé par cet état de grâce, c’est le temps, à l’intérieur duquel l’être soudain glisse, troublante adjectivation du monde. A l’image de cette demeure « éteinte plutôt que morte » que Julien Gracq fait sortir par son regard de « ces bois de mauvais songe », il dévêt le monde pour réveiller le merveilleux incrusté dans le réel, érigeant l’opéra en modèle du roman. De l’épaisseur des choses essorées par la remémoration, passé-présent évaporé, son écriture fait résonner les sons, les taillis et les ronces d’un présent-passé réactivé, éblouissante liturgie intime. Ju. E.
« La Maison », de Julien Gracq, Corti, 84 p., 15 €.
FANTASTIQUE. « Conte de fées », de Stephen King
Si vous avez aimé l’ancestrale histoire anglaise Jack et son haricot magique, vous savourerez Conte de fées, le nouveau Stephen King. A 75 ans, le maître américain du suspense et de l’angoisse offre, lui aussi, un conte, proche de la littérature jeunesse, où un garçon rencontre un vieil homme qui lui ouvre les portes d’un autre monde et le fait passer à l’âge adulte à l’issue d’une série d’épreuves.
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Source: Le Monde