Sylvain Bellenger, directeur du Musée de Capodimonte, à Naples : " Nous prêtons soixante-dix œuvres au Louvre "

June 08, 2023
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Salle maniériste du Museo e Real Bosco de Capodimonte, à Naples (Italie). AMEDEO BENESTANTE

Le Museo e Real Bosco de Capodimonte, sur les hauteurs de Naples, est l’une des plus grandes collections d’Italie. Mais, en dépit de sa richesse, il reste moins connu que les Offices, à Florence, ou que l’Accademia, à Venise. Pour mettre l’établissement au premier plan, le directeur, Sylvain Bellenger, engage un chantier de rénovation de grande ampleur. Pendant la fermeture nécessaire aux travaux, une « anthologie » des chefs-d’œuvre qu’il recèle circule. Première étape : le Louvre, pour sept mois.

Les chefs-d’œuvre de Capodimonte sont au Louvre le temps de la rénovation du musée. Que souhaitez-vous changer ?

Beaucoup de choses. Les toits seront ouverts pour y placer des panneaux photovoltaïques, qui produiront 91 % de notre consommation électrique et une économie de 1 million d’euros par an. L’air conditionné sera installé à tous les étages et l’éclairage refait. Les salles consacrées à l’art contemporain et les zones d’accueil seront reprises. Tous ces espaces seront donc inaccessibles. Et ces chantiers structurels vont de pair avec une campagne de restauration à la mesure de nos collections : Capodimonte conserve 49 000 œuvres… Donc nous prêtons au Louvre soixante-dix de nos œuvres les plus importantes pour qu’elles demeurent visibles. Ensuite, elles iront à la Venaria Reale, à Turin, puis rentreront à Naples.

Ces travaux sont l’aboutissement d’une longue mutation du musée, que vous dirigez depuis 2015…

Il possède des collections exceptionnelles, connues des spécialistes, mais moins des touristes qui se rendent à Naples, de plus en plus nombreux aujourd’hui. Ils vont à Pompéi, à Herculanum et à Caserte. Plus rares sont ceux qui montent à Capodimonte. Il faut donc les convaincre. Depuis 2015, j’ai travaillé sur trois points. D’abord le parc, qui est le plus grand jardin urbain du pays : 134 hectares avec dix-neuf édifices à l’intérieur. Il était à l’abandon et nous lui avons rendu sa beauté, tout en en faisant un endroit sûr. Ensuite, les expositions : trente-deux en huit ans, grandes et petites. Et, à la lumière de celles-ci, une réflexion générale : comment présenter ces collections au XXIe siècle, en introduisant toutes les commodités de la digitalisation, mais en sortant aussi des réserves une partie des collections d’arts appliqués, qui sont immenses.

Nous avons ainsi 7 000 porcelaines, parce que la manufacture royale de porcelaine a été créée au XVIIIe siècle par Charles de Bourbon, en même temps que le royaume indépendant de Naples. Or, ce côté royal avait disparu du musée. Le palais est resté une résidence privée de la famille de Savoie jusqu’en 1947 et, quand il est devenu musée, en 1957, les signes monarchiques en ont été effacés, pour des raisons politiques qui se comprennent dans le contexte de l’époque. Aujourd’hui, il est possible de réaffirmer cette dimension et de rendre à Capodimonte toute son histoire.

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Source: Le Monde