Athlétisme : à un an des JO, Paris réussit sa répétition générale avec les records du monde de Faith Kipyegon, Lamecha Girma et Jakob Ingebrigtsen

June 09, 2023
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La Kényane Faith Kipyegon est désormais recordwoman du monde du 5 000 mètres. Ici, le 9 juin 2023, à Paris. JEFF PACHOUD / AFP

Dans un an, l’athlétisme – sport roi des Jeux olympiques (JO) – aura le droit à l’enceinte royale du Stade de France. Vendredi 9 juin, au stade Charléty, une belle sélection d’athlètes a participé à une répétition lors du meeting de Paris de la Ligue de Diamant 2023.

Les 18 000 spectateurs parisiens – ils seront 80 000 l’an prochain à Saint-Denis – ont assisté à un programme riche et varié, même s’ils ont été légèrement grondés par un champion du monde. « On sent que les gens aiment l’athlétisme mais surtout quand les JO arrivent. Il faudrait être un peu plus constant », a fait remarquer Kevin Mayer, qui a remporté son traditionnel triathlon, épreuve conçue sur mesure pour lui et hors programme officiel.

Les coureurs ont assuré le spectacle. La Kényane Faith Kipyegon, l’Ethiopien Lamecha Girma et le Norvégien Jakob Ingebrigtsen ont amélioré trois records du monde. Double championne du monde et olympique du 1 500 mètres, Kipyegon a amélioré le meilleur chrono de l’histoire du 5 000 mètres : 14 minutes 5 secondes et 20 centièmes. Il était détenu depuis le 7 octobre 2020 par l’Ethiopienne Letesenbet Gidey en 14 minutes 6 secondes et 62 centièmes.

Kipyegon, double recordwoman du monde

Scénario encore plus fou, Gidey était présente sur la piste parisienne et a vu son propre record tomber tout en offrant une belle résistance à Kipyegon. Mais rien ne semble résister à la Kényane, tout juste auréolée d’un nouveau record du monde sur 1 500 mètres il y a une semaine à Florence (Italie).

A 29 ans, Kipyegon, qui est revenue au plus haut niveau après la naissance de sa fille en 2018, se verrait bien sur un marathon dans quelques années. « J’aime profondément courir. Je veux montrer à ma fille qu’il faut se donner à 100 % dans ce que l’on aime faire, de tout mettre en place pour y arriver », avait-elle confié au Monde la veille de sa course parisienne.

En début de soirée, le Norvégien Jakob Ingebrigtsen a réalisé ce que l’on attendait de lui : battre le record du monde du 2 miles – une discipline qui a connu ses heures de gloire outre-manche et qui n’est plus officiellement reconnue par l’IAAF, la fédération internationale –, et pour lequel on l’avait placé dans les meilleures conditions possibles avec l’apport de deux lièvres et celui de la technologie Wavelight qui matérialise le record par des signaux lumineux autour de la piste.

Le prodige du demi-fond international avait déjà battu un autre record du monde indoor du 1 500 m de quelques secondes en février 2022, en France à Liévin (Pas-de-Calais). Le champion olympique à Tokyo a parcouru le 2 miles (3 218 mètres) en 7 minutes 54 secondes et 10 centièmes. « Je savais de quoi j’étais capable mais c’est différent de le réaliser, c’est surréel, a-t-il déclaré, Je veux finir avec dix records ou plus. Je vais essayer de courir le plus vite que je peux. »

Ingebrigtsen a tout simplement pulvérisé le record très symbolique du Kenyan Daniel Komen (7 minutes 58 secondes et 61 centièmes), également détenteur du record du monde du 3 000 mètres (en extérieur). Visiblement en recherche de défi à trois mois des championnats du monde où il pourrait de nouveau réaliser un doublé sur 1 500 et 5 000 mètres, le Norvégien a mis dans le vent ses adversaires kenyans et éthiopiens pour finir seul dans la dernière ligne droite, sous les encouragements d’un public conquis.

Jakob Ingebrigtsen célèbre le record du monde du 2 miles, vendredi 9 juin 2023, à Paris. JEFF PACHOUD / AFP

Plus inattendu, le troisième record du monde de la soirée est venu de l’Ethiopien Girma Lamecha sur 3 000 mètres steeple (7 minutes 52 secondes et 11 centièmes), dans un stade en fusion. Il efface des tablettes le Qatarien Shaheen Saif Saaeed, qui avait couru la distance en 7 minutes 53 secondes et 63 centièmes en 2004. Déjà vice-champion olympique à Tokyo, l’athlète de 22 ans est l’une des étoiles montantes de l’athlétisme éthiopien. Il s’était déjà attribué, cet hiver, le record en salle du 3 000 mètres, à Liévin.

Une autre jeune vedette du demi-fond mondial a brillé devant le public parisien. La Britannique Keely Hodgkinson, vice-championne olympique et mondiale du 800 mètres, a bouclé le double tour de piste en 1 minute 55 secondes et 77 centièmes, soit la vingt-cinquième meilleure performance de tous les temps. Avec son compère Jake Wightman, titré lors des championnats du monde 2022 sur 1 500 mètres, la jeune femme de 21 ans incarne le renouveau britannique des courses de demi-fond.

Côté Français, la meilleure performance est venue du point fort de l’athlétisme tricolore, le 110 mètres haies. Si Pascal Martinot-Lagarde a été éliminé en demi-finale, Just Kwaou-Mathey a réalisé une superbe soirée, améliorant par deux fois son record personnel et terminant à la deuxième place : 13 secondes 25 en demi-finale et 13 secondes 9 en finale. Le hurdler de 23 ans réussit ainsi le troisième chrono français de l’histoire, derrière notamment le record de France de Martinot-Lagarde (12 secondes 95).

L’an passé aux Mondiaux d’Eugene (Oregon), Kwaou-Mathey avait déjà été le meilleur français avec un chrono de 13 secondes 25 en demi-finale, non homologué à cause du vent et insuffisant pour entrer en finale. A Paris, c’est l’Américain Grant Holloway qui s’est imposé en 12 secondes 98. Le Français Wilhem Belocian a terminé cinquième en 13 secondes 20.

Match à sens unique sur 100 mètres

Vedette annoncée de la soirée, détentrice du record du monde du 400 mètres haies, Sydney McLaughlin-Levrone a encore du boulot sur 400 mètres plat. Partie très fort dans le premier virage, l’Américaine à la longiligne foulée a bloqué dans la dernière ligne droite, ouvrant la piste à la spécialiste dominicaine Marileydi Paulino (49 secondes 12 centièmes), médaillée d’argent aux JO de Tokyo, qui s’est envolée vers la victoire.

Mention tout de même encourageante pour McLaughlin, qui améliore son record personnel (49 secondes 71 centièmes) sur une distance à laquelle elle ne se frottait plus depuis plusieurs années, son précédent record remontant à 2018.

Autre moment attendu en sprint, le 100 mètres masculin a été décevant puisque le champion olympique italien Marcell Jacobs n’a jamais été dans le coup, septième en 10 secondes 21. Son rival annoncé, l’Américain Noah Lyles, a lui répondu présent en s’imposant en 9 secondes 97 devant le Kényan Ferdinand Omanyala (9 secondes 98) et le Botswanais Letsile Tebogo (10 secondes 05), recordman du monde junior de la spécialité. Une belle performance pour Lyles, spécialiste du 200 mètres, double champion du monde de cette distance.

Il vise pour la première fois cette année un doublé 100-200 mètres lors des Mondiaux 2023. Sûr de sa force sur le 200 mètres après son chrono canon réalisé à Eugene en 2022 (19 secondes 31), s’il parvient à franchir le piège redoutable des sélections américaines, le Floridien de 25 ans devrait être l’un des candidats à la victoire sur la ligne droite cet été en Hongrie. Et l’une des vedettes des Jeux de Paris à l’été 2024.

Source: Le Monde