À Saint-Brévin, Dorothée Pacaud succède à Yannick Morez lors d'un conseil municipal sous surveillance

June 10, 2023
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REPORTAGE - Celle qui assurait l'intérim depuis la démission de l'ancien maire Yannick Morez a été élue vendredi soir. Une dizaine d'individus venus d'ailleurs pour dénoncer le futur CADA ont tenté de perturber la soirée, avant d'être repoussés par les gendarmes.

Le Figaro Nantes

«Une femme avec une main de fer dans un gant de velours.» : voici comment Yannick Morez a décrit sa successeur Dorothée Pacaud, ce vendredi soir, après son élection en tant que nouvelle maire de Saint-Brévin-les-Pins. Avec 26 voix sur 31, l'ancienne première adjointe devient la première femme à endosser ce rôle dans la station balnéaire de 14.000 habitants, régulièrement à la une de l'actualité depuis la démission fracassante du précédent édile.

Il y a un mois, ce dernier avait annoncé quitter ses fonctions après l'incendie en mars de ses véhicules et d'une partie de sa maison. L'enquête en cours n'a pas permis de déterminer les auteurs de ces actes. L'ex-maire avait indiqué avoir reçu auparavant des menaces de l'extrême droite en lien avec le déménagement et l'agrandissement d'un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), près d'une école.

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«Hier Annecy, demain Saint-Brévin»

«Les travaux ont commencé, le centre ouvrira en fin d'année, je pense que la tension baissera. Je l'espère» a déclaré Dorothée Pacaud, dont la candidature avait été portée par la majorité municipale. Durant la soirée, quelques tensions étaient pour l'instant encore perceptibles. D'abord, une quinzaine de gendarmes et des policiers municipaux étaient mobilisés pour surveiller le conseil municipal. À l'entrée, un communiqué de «coordination partout Callac», engagé contre l'installation de structures d'accueil pour les migrants dans les campagnes, était distribué aux participants avec l'inscription suivante : «Après le drame d'Annecy, êtes-vous toujours aussi sûr qu'un drame du même type est impossible à la Pierre Attelée si vous y installez un CADA ?». Une heure après, environ dix individus se sont postés devant les vitres du conseil avec des fumigènes en scandant «Hier Annecy, demain Saint-Brévin», avant d'être repoussés par les militaires. Selon les autorités, il s'agissait d'individus de l'ultra-droite venus des alentours, notamment Tours et Angers.

Une dizaine d'individus a tenté d'interpeller le conseil municipal. LT/Le Figaro

À la fin du conseil, une habitante interpellait la nouvelle maire sous l'œil des caméras : «Je suis opposée à ce projet. Je suis ni violente, ni d'extrême droite , rien de tout ça, simplement les derniers évènements montrent qu'on a raison de s'inquiéter», en référence à l'assaillant d'Annecy, un demandeur d'asile syrien. À la sortie, un petit groupe d'habitants dénonçait le manque de concertation et remettait également en cause le lieu d'implantation, loin du centre et difficile d'accès.

« C'est un discours extrêmement dangereux. Aujourd'hui il y a des violences intrafamiliales, des femmes qui sont victimes, ce ne sont pas forcément des migrants. Ça laisse penser aux gens que c'est l'étranger l'agresseur. Alors que non» a répondu Dorothée Paquot, édile sans étiquette, en parlant d'«amalgame scandaleux». «Je pense que la population n'est pas divisée comme on le dit. Je pense qu'il y a une minorité qui s'exprime mais qu'il y a une majorité de gens qui sont en phase avec des valeurs essentielles», exposait-elle quelques secondes avant d'être interrogée.

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Je m'attendais à cette entrée en matière musclée. On sait qu'il y a un contexte compliqué Dorothée Pacaud, nouvelle maire de Saint-Brévin-les-Pins

«Je m'attendais à cette entrée en matière musclée. On sait qu'il y a un contexte compliqué mais je suis sereine», a-t-elle encore poursuivi, en assurant ne pas avoir peur. Elle a déjà eu l'occasion de porter plainte : «Parmi les courriers de soutien à Yannick Morez, il y a trois courriers haineux dont un qui me visait également», a-t-elle révélé. Mais elle compte sur le soutien de son équipe et des autorités : «oui je crois que je serai plus défendue. Je pense que la parole a été portée haut», espère-t-elle en écho à l'entrevue de Yannick Morez avec la première ministre Élisabeth Borne. Elle a aussi fait remarquer qu'«au quotidien, il n'y a pas que cette histoire de CADA».

Yannick Morez a d'ailleurs tenu à saluer, dans son discours, la détermination de son ancienne binôme «pour faire aboutir les projets travaillés au sein de l'équipe» et sa passion pour «l'art en général, la musique, la danse, la peinture, la sculpture, le théâtre, la culture». Quant à lui, siégeant en tant que conseiller municipal, une protection fonctionnelle lui a été attribuée afin de permettre à la ville de prendre en charge les frais juridiques en lien avec «l'attentat criminel et menaces dont il a été victime dans l'exercice de ses fonctions». L'élu quittera définitivement ses fonctions cet été, puis déménagera pour partir faire un tour du monde en bateau avec son épouse. Un projet qu'il avait initialement prévu de faire en 2026, à la fin de son mandat.

Deux conseillères de l'opposition qui ont refusé de prendre part au vote auraient souhaité une «consultation citoyenne». LT/Le Figaro

Source: Le Figaro