" La reine Cléopâtre " sur Netflix fait réagir jusqu’au gouvernement égyptien
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NETFLIX - Cléopâtre avait la « peau blanche et des traits hellénistiques », a tranché, ce jeudi 27 avril, le ministère égyptien des Antiquités, alors que Netflix a annoncé la sortie prochaine d’un docufiction dans lequel une actrice noire incarne la célèbre reine, suscitant des réactions passionnées dans le pays.
La Reine Cléopâtre, produit par Jada Pinkett Smith et présenté comme « fondé sur des reconstitutions et des témoignages d’experts », sera diffusé le 10 mai sur la plateforme de vidéo à la demande.
La bande-annonce assure que ce docufiction retrace la vie de la dernière pharaonne d’Égypte, « en lutte pour défendre son trône, sa famille et son œuvre », mais avant même sa diffusion, il suscite une vive polémique en Égypte. De nombreux internautes y ont vu une réécriture de l’Histoire tandis qu’une pétition en ligne, intitulée « Arrêtez le documentaire sur Cléopâtre sur Netflix pour falsification historique », a recueilli plus de 40 000 signatures.
Et, dans un pays où régulièrement des voix réclament l’interdiction de Netflix pour des contenus jugés offensants pour l’Égypte ou « ses valeurs familiales », la députée Saboura al-Sayyed a demandé une énième fois au Parlement d’interdire la plateforme.
« Pourquoi Cléopâtre ne serait-elle pas métisse ? »
Ce jeudi, le ministère des Antiquités a publié un long communiqué citant de nombreux experts, tous catégoriques : Cléopâtre avait la « peau blanche et des traits hellénistiques », concluent-ils. « Les bas-reliefs et les statues de la reine Cléopâtre en sont la meilleure preuve », poursuit le ministère dans son texte agrémenté de tétra drachmes, des pièces de monnaies grecques, et de statues en marbre représentant Cléopâtre avec des traits européens.
Pour Moustafa Waziri, patron des Antiquités égyptiennes, représenter la souveraine en femme noire n’est rien d’autre qu’une « falsification de l’histoire égyptienne ». Mais ce rappel à l’ordre est surtout motivé par « la défense de l’histoire de la reine Cléopâtre, qui est une partie importante de l’histoire de l’Égypte antique, indépendamment de toute considération raciale », tient-il à préciser.
La réalisatrice du documentaire, elle, dénonce une campagne de dénigrement. Dans une tribune publiée sur le site du magazine Variety, Tina Gharavi s’interroge : « Pourquoi Cléopâtre ne serait-elle pas métisse ? Et pourquoi certaines personnes ont-elles besoin que Cléopâtre soit blanche ? Sa proximité avec la blancheur semble lui donner de la valeur, et pour certains Égyptiens, cela semble vraiment important. »
Régulièrement en Égypte, des internautes et des commentateurs dénoncent des campagnes, principalement venues de groupes afro-américains, revendiquant l’origine de la civilisation égyptienne. Tina Gharavi explique avoir été, depuis le début du tournage, accusée de vouloir voler l’histoire des Égyptiens. « Certains ont menacé de ruiner ma carrière », continue-t-elle, toujours dans les colonnes de Variety.
Une longue histoire au cinéma
Si la légende raconte que la reine née vers 69 avant J.-C. était d’une grande beauté, son apparence et sa couleur de peau restent largement sujettes à interprétation. Elle a été longtemps identifiée comme une femme blanche, du fait de son lien de parenté avec un ancien compagnon d’Alexandre Le Grand, mais certains pensent qu’il s’agirait peut-être d’une femme noire ou métisse.
Cléopâtre appartenait à la dynastie macédonienne des Lagides, issue du général Ptolémée devenu, lors du partage de l’empire d’Alexandre le Grand, roi d’Égypte qui a vu s’épanouir la civilisation hellénistique sur les bords du Nil.
De plus, une étude du crâne de sa sœur a montré que cette dernière possédait des caractéristiques physiques propres à certaines personnes noires, « ce qui tendrait à démontrer que Cléopâtre avait également des origines africaines », note également un article du Monde.
Alors qu’en 2009, un documentaire de la BBC affirmait qu’elle avait du sang africain, sans pour autant éveiller les passions, Cléopâtre est régulièrement interprétée par des femmes blanches au cinéma, suscitant parfois des accusations de whitewashing, une pratique qui consiste à représenter une personne non-blanche sous les traits d’une blanche.
En 2020, Gal Gadot (Wonder Woman) avait ainsi été choisie par la réalisatrice Patty Jenkins en vue de son biopic sur la reine, succédant ainsi à Monica Belucci, qui a prêté ses traits à la légendaire souveraine dans Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, mais aussi et surtout à Elizabeth Taylor. L’actrice britannico-américaine l’a interprétée en 1963 dans le film de Joseph Mankiewicz, Cléopâtre.
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Source: Le HuffPost