Les nouvelles prévisions d'inflation de la BCE ont jeté un froid en Bourse
Par La Rédaction d'Investir
Publié le 15 juin 2023 à 17:49
Et Christine Lagarde créa la surprise. Attendue au tournant, quoi que moins que la Fed, la Banque centrale européenne (BCE) a décidé, ce jeudi, de relever ses trois taux directeurs de 25 points de base, portant ainsi le « refi » à 4%, le taux de la facilité de prêt marginal à 4,25% et le taux de dépôts à 3,5%.
Ce resserrement, le huitième consécutif depuis juillet 2022, a pour objectif de lutter contre une inflation tenace... bien plus tenace que prévu. Tellement collante que la BCE a été contrainte de revoir à la hausse ses anticipations en matière de prix. L’inflation dite « core », hors énergie et produits alimentaires, devrait atteindre 5,1% en 2023, soit 0,5 point de plus que lors de l’estimation de mars. Elle devrait ensuite ralentir à 3% en 2024 puis 2,3% en 2025, selon l’institution monétaire, qui a révisé, là encore, ses projections puisqu’en mars elle tablait sur un indice « core » des prix à la consommation de 2,5% en 2024 et de 2,2% en 2025.
« Les services de l’Eurosystème ont révisé en hausse leurs projections [...] en raison d’évolutions haussières antérieures non anticipées et des effets de la vitalité du marché du travail [et du coût unitaire du travail, ndlr] sur le rythme de la désinflation », a expliqué Christine Lagarde, ajoutant qu’il n’y a toutefois pas d’effet de second tour et que ces révisions ont fait l’objet d’un « large consensus. » « Nous sommes au milieu de la lutte contre l’inflation. Nous avons une cible de 2% à moyen terme et nous voulons y être », a répondu la présidente de la BCE, interrogée sur le fait que « 3% pourrait être le nouveau 2%. » « Les décisions que nous avons prises depuis un an et demi ont été monumentales en termes de rapidité et de remontée des taux. Nous observons leurs effets sur le crédit bancaire et le financement. Il y a un délai de latence, dans les standards, entre 18 et 24 mois, car la situation est exceptionnelle. » En même temps que les anticipations d’inflation « core » ont été relevées, les projections de croissance de la BCE ont été ajustées de 1% à 0,9% pour 2023 et de 1,6% à 1,5% pour 2024.
President Christine @Lagarde introduces the economic growth outlook for the euro area pic.twitter.com/yZjnRHKenJ — European Central Bank (@ecb) June 15, 2023
Ce qu'il faut retenir de tout cela, c'est que les taux d'intérêt vont continuer à augmenter dans la zone euro au mois de juillet. « Ce n’est pas une surprise pour vous », a lancé la patronne de la BCE au journaliste qui lui posait la question. « Nous sommes déterminés à atteindre notre objectif d’inflation et à appliquer nos principes, ceux de l’indépendance et d’avancer meeting après meeting. Tant qu’il n’y aura pas de changement dans l’inflation de base, il n’y aura pas de pause. »
Pris au dépourvu par ces nouvelles projections d’inflation, le Cac 40, déjà frileux à la mi-journée, a accentué son repli. Il a fini la séance de jeudi en baisse de 0,51%, à 7.290,91 points, après un point bas à 7.246,33 points. Le volume d’affaires a totalisé 2,9 milliards d’euros. Les valeurs cycliques (Alstom et ArcelorMittal, par exemple) ont été les premières à réagir, abandonnant du terrain. Le secteur bancaire a également pesé.
Une pause avant une nouvelle hausse
Alors que la BCE garde le pied sur l’accélérateur des taux, la Réserve fédérale américaine a, elle, opté pour un statu quo mercredi. Le taux des Fed funds reste dans sa fourchette actuelle de 5% à 5,25%... jusqu’en juillet probablement. « Les projections individuelles des membres du FOMC indiquent qu’une majorité des banquiers centraux tablent désormais sur deux hausses de 25 points de base supplémentaires cette année, comme Axel Botte, directeur de la stratégie marchés chez Ostrum AM. La Fed exclut toute baisse de taux en 2023 à l’unanimité de ses membres. » En effet, l’inflation, comme en Europe, joue les prolongations au point que la Fed a relevé sa prévision d’inflation sous-jacente de 0,3 point, à 3,9% au dernier trimestre 2023. En revanche, l’hypothèse d’une récession est écartée. « Le message de Jerome Powell est clairement que la Fed ne réagira pas à la baisse mécanique de l’inflation et les taux d’intérêt resteront élevés afin de contraindre les anticipations d’inflation. Powell a même laissé entendre que les taux ne baisseraient pas à l’horizon de deux ans. La Fed augmentera même significativement ses taux en termes réels à mesure que l’inflation diminuera. C’est le prix à payer pour éviter une remontée précoce de l’inflation liée à l’inertie des anticipations », ajoute l’expert.
Dure journée pour Prodways
Parmi les autres valeurs, le segment du luxe, sensible à la conjoncture chinoise, a perdu du terrain. Les KHOL (Kering, Hermès, L’Oréal et LVMH) abandonnant entre 0,58% et 1,26% à la clôture. Pas une journée ne passe sans que Casino (+0,37%) ne fasse parler de lui. Le distributeur stéphanois a indiqué, mercredi soir, avoir reçu un courrier de Fimalac, holding de l’homme d’affaires Marc Ladreit de Lacharrière, indiquant qu'il étudie une éventuelle participation au projet d'augmentation de capital porté par Daniel Kretinsky.
Enfin, Prodways s’est effondré de 22,74%, non sans avoir inscrit un nouveau plus bas historique à 1,424 euro en séance. Le spécialiste de l’impression 3D professionnelle a lancé une double alerte sur ses ventes et sa rentabilité en 2023.
Source: Investir