Télécoms : Bruxelles veut définitivement bannir les équipementiers chinois Huawei et ZTE
Thierry Breton, à Bruxelles (Belgique), le 16 mars 2023. KENZO TRIBOUILLARD / AFP
La Commission européenne durcit le ton contre les équipementiers télécoms chinois Huawei et ZTE. Dans une communication adoptée le 15 juin, Bruxelles « souligne ses vives inquiétudes quant aux risques que certains fournisseurs d’équipements de communication pour réseaux mobiles font peser sur la sécurité de l’Union ». Elle cite nommément les deux groupes chinois, ce qu’elle n’avait encore jamais fait dans ses précédentes décisions sur le sujet. Selon la Commission, Huawei et ZTE « représentent des risques matériellement plus élevés que d’autres fournisseurs de 5G ».
Lors d’une conférence de presse, Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, qui avait envoyé quelques signaux ces dernières semaines sur le sujet, a donc appelé « tous les Etats membres et les opérateurs de télécommunications à prendre les mesures nécessaires sans plus attendre » pour bannir de leurs réseaux les matériels Huawei et ZTE.
La Commission appliquera la mesure pour elle-même : elle va demander à tous ses fournisseurs de télécommunications de ne plus utiliser les équipements des deux groupes chinois, y compris dans toutes ses représentations nationales, ce qui pourrait avoir un effet d’entraînement auprès d’autres institutions, espère Bruxelles.
Interceptions à des fins d’espionnage
Pourquoi ce coup de sang contre les deux équipementiers chinois ? Aucun événement particulier récent n’est à l’origine de cette décision, assure-t-on à Bruxelles, où l’on dit avoir identifié depuis longtemps les risques pour la sécurité posés par la présence de matériel étranger dans les télécoms, en particulier dans les cœurs de réseaux, là où le risque d’interceptions à des fins d’espionnage est le plus élevé.
En octobre 2020, le Conseil de l’Union européenne avait appelé les Etats membres à mettre en œuvre les recommandations énoncées dans la boîte à outils sur la cybersécurité de la 5G (EU Toolbox) dévoilée en janvier de la même année par le groupe de coopération des autorités de cybersécurité, la Commission et l’Agence de l’Union européenne pour la cybersécurité (Enisa).
Depuis, Bruxelles s’inquiète du retard pris dans l’application de cette boîte à outils, d’où son insistance. Selon un rapport remis le 15 juin, vingt-quatre Etats membres ont adopté ou préparent une législation interdisant les équipementiers télécoms de pays jugés à risque pour la sécurité. Mais seulement dix d’entre eux appliquent réellement des mesures de restriction.
La France fait partie de ceux-ci. Huawei et ZTE ne sont pas formellement bannis de l’Hexagone. Mais depuis la loi d’août 2019, dite 5G, « visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles », les opérateurs français doivent obtenir une autorisation de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) pour pouvoir installer un équipement d’un fournisseur non communautaire, ce qui revient dans les faits à interdire des matériels Huawei et ZTE dans les parties les plus sensibles de leurs réseaux. Le Portugal est le dernier pays européen à avoir adopté en mai une loi « anti-Huawei ».
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Source: Le Monde