Notre critique du documentaire L'apocalypse à l'Âge du bronze : l'énigme d'un effondrement sur France 5
Un formidable documentaire évoque Le phénomène, encore assez mal compris par les spécialistes, qui a décimé la civilisation mycénienne et l'empire Hittite. L'apocalypse à l'Âge du bronze, un film à ne pas manquer, ce jeudi 29 juin à 21 heures sur France 5.
Fuir la mer. Lui échapper coûte que coûte et se réfugier aux altitudes les plus inaccessibles par les flots. Lorsqu'il se hisse au sommet d'une corniche, dans les montagnes de Crète, l'archéologue polonais Krzysztof Nowicki découvre un village de la fin de l'âge du bronze. Perché sur un promontoire, à plus de 1 500 mètres, le site était presque caché. Il n'est pas unique. Une trentaine de hameaux similaires ont été dénombrés et datés des alentours de 1200 avant notre ère. « Il fallait être vraiment terrifié par quelque chose pour s'installer ici », observe le chercheur.
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Enchaînement fatal
Il y a plus de 3 000 ans, la fin du monde empruntait déjà des chemins familiers. La terre tremblait sous les temples et les palais ; le soleil cognait et terrassait les récoltes ; des peuples en perdition prenaient la mer. Enchaînement fatal. Une poignée de royaumes de la Méditerranée orientale en font les frais aux alentours de 1 200 avant J.-C. L'« effondrement de l'âge du bronze », comme les historiens et les archéologues surnomment cette conjonction de catastrophes, est le sujet du passionnant documentaire de Katie Reisz.
L'Apocalypse à l'âge du bronze entreprend une enquête historique au ras des ruines de ce qui s'apparente à une vaste scène de crime, à l'échelle de plusieurs milliers de kilomètres carrés. Cette séquence dramatique, qui aurait duré quelques dizaines d'années à peine, précipite en Grèce la chute de la civilisation mycénienne et le début des siècles dits « obscurs ». De formidables forteresses sont mises à sac ; les sources écrites s'épuisent et la pratique même de l'écriture s'étiole. Mycènes n'est pas l'unique entité de la fin de l'âge du bronze à chavirer.
Essaims de pirates
À la fin du deuxième millénaire avant notre ère, cette région du monde forme un antique concert des nations. De lucratifs réseaux d'échanges commerciaux quadrillent cette partie du bassin méditerranéen. Les forges de la Grèce mycénienne rejettent des océans de bronze, le pétrole de l'époque, qui était si convoité de l'empire hittite, en Anatolie, à l'Égypte et jusqu'aux cités ponctuant les rivages de la Crète et du Levant. Tous ces acteurs sont bousculés, voire balayés dans une tempête aux contours encore mal cernés.
Les historiens, c'est connu, se méfient des solutions simples et des coupables idéaux. Le bouc émissaire de cet « effondrement » est tout nommé. Il s'agirait des « peuples de la mer ». Un bas-relief du temple de Ramsès III, près de Thèbes, illustre ces adversaires redoutables, ces tombeurs d'empires qui firent vaciller le monde égyptien. Les sculpteurs ont représenté des guerriers à l'équipement hétéroclite, repoussés par les armées de pharaon. Des femmes et des enfants les accompagnaient. Ce détail sème le doute. S'agissait-il d'essaims de pirates ou de vagues migratoires ? Difficile de trancher.
Première grève de l'histoire
C'était, semble-t-il, une coalition de peuples. Les plus connus d'entre eux, les Philistins, s'installent par la suite en Phénicie. Ici, le documentaire tient à rappeler une évidence. Leurs tribulations chaotiques en Méditerranée peuvent aussi bien être la cause que la conséquence des bouleversements de la fin de l'âge du bronze. Des catastrophes climatiques ou encore des troubles internes aux différents empires figurent également au banc des accusés. Cette civilisation a-t-elle été à ce point fragilisée ? Une anecdote est révélatrice. Les hiéroglyphes racontent que Ramsès III a dû faire face à un mouvement social. La première grève attestée de l'histoire entache la fin de son règne, le dernier de l'âge d'or égyptien. Les secrets de l'apocalypse sont, parfois, impénétrables
Source: Le Figaro