En Hongrie, une librairie condamnée à verser une amende record pour la vente du livre Heartstopper
ATTILA KISBENEDEK / AFP ATTILA KISBENEDEK / AFP
HONGRIE - En Hongrie, les mesures anti LGBT+ se poursuivent. Les autorités ont condamné la librairie Lira Kiskereskedelmi Kft à payer une amende record de 12 millions de forints (32 000 euros), selon un article de la BBC. Ce qu’on lui reproche ? Avoir vendu au rayon jeunesse et sans emballage plastique le roman graphique Heartstopper, racontant un amour naissant entre deux lycéens.
La série de livres Heartstopper, écrite et illustrée par l’autrice britannique Alice Oseman, suit la vie de deux adolescents qui se rencontrent et tombent amoureux. Il est présenté comme un livre sur « la vie, l’amour et tout ce qui se passe entre les deux », selon la BBC. Les livres ont depuis été popularisés par la série Netflix du même nom.
L’amende a été infligée par le bureau du gouvernement métropolitain de Budapest, qui a déclaré à l’agence de presse d’État MTI qu’il avait mené une enquête sur la librairie pour avoir vendu des titres qui décrivent des intrigues impliquant l’homosexualité.
« L’enquête a déterminé que les livres » de l’autrice britannique Alice Oseman, « bien que dépeignant l’homosexualité, étaient proposés dans le rayon jeunesse », a expliqué le gouvernement.
Une législation jusqu’ici peu mise en œuvre dans les librairies
Cette amende est donc justifiée par une loi de 2021 mise en place par le gouvernement du Premier ministre Viktor Orban qui interdit « l’affichage et la promotion de l’homosexualité » chez les moins de 18 ans.
La loi stipule aussi que les mineurs ne peuvent pas voir de contenu pornographique ou tout ce qui encourage le changement de genre ou l’homosexualité.
Jusqu’ici, la législation restait peu mise en œuvre dans les librairies. « Or désormais, l’État commence à l’appliquer de manière aléatoire », explique à l’AFP Krisztian Nyary, directeur créatif de la société Lira. Il s’agit d’un montant sans précédent, note-t-il, déplorant des « règles obscures », difficiles à respecter.
Une loi vivement critiquée
La nouvelle législation a fait l’objet de vives critiques, notamment de la part du Parlement européen, qui a déclaré qu’elle violait « les valeurs, les principes et le droit de l’UE ». La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait qualifié la loi de « honte ».
La communauté LGBT+ de Hongrie a également critiqué la législation lors de son introduction, affirmant qu’elle restreindrait la liberté d’expression et les droits des enfants.
Le gouvernement affirme, lui, que la loi fait partie d’un effort visant à protéger la culture chrétienne du pays.
Une instrumentalisation politique
La situation est aussi tendue au sein de la maison d’édition rivale Libri, qui a écopé d’une lourde sanction en mai avant de passer sous le contrôle de la fondation Mathias Corvinus Collegium (MCC), proche du gouvernement.
Amnesty International dénonce, par la voix de son directeur à Budapest David Vig, ces « scandaleuses » restrictions des droits.
« Le gouvernement instrumentalise le sujet à l’approche des élections locales et européennes de 2024 pour mobiliser sa base et détourner l’attention » des problèmes, a-t-il affirmé à l’AFP.
Viktor Orban, défenseur en Europe des valeurs « illibérales », a pris au fil des ans plusieurs mesures décriées. Le pays de 9,7 millions d’habitants a ainsi interdit les études de genre, l’inscription du changement de sexe à l’état civil et l’adoption par les couples homosexuels.
Le Parlement avait également voté en avril un texte autorisant la délation anonyme de ceux qui « remettent en cause » la définition constitutionnelle du mariage, de la famille et du genre. Mais il a été retiré devant les critiques.
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Source: Le HuffPost