Il télétravaille dans l’avion, un collègue présent à bord le reconnaît et le dénonce à sa hiérarchie

April 24, 2023
279 views

Il télétravaille dans l’avion, un collègue présent à bord le reconnaît et le dénonce à sa hiérarchie

Par Eva LERAY

Télétravailler en dehors de son domicile a coûté cher à un employé de l’administration belge, mi-avril. Alors qu’il avait embarqué dans un avion à destination du Portugal, un de ses collègues présent sur le même vol l’a dénoncé à ses supérieurs. Conséquence : le fonctionnaire a été licencié.

C’est une coïncidence qui a coûté cher à un fonctionnaire de l’administration belge. Mi-avril 2023, cet analyste de profession embarque à l’aéroport de Bruxelles (Belgique) à bord d’un avion à destination de Porto (Portugal). Un de ses collègues, présent sur le même vol, le reconnaît. Le problème ? Le fonctionnaire n’est pas en congé… Il est censé être à son domicile, en train de télétravailler. L’autre homme le sait, et décide de le dénoncer à leur hiérarchie. Résultat : l’analyste sera licencié.

Lire aussi : Pourquoi les « tracances », cette tendance à travailler depuis son lieu de vacances, font polémique

Pour tenter de conserver son emploi, l’employé remercié a engagé un avocat pour se défendre, rapporte le quotidien belge La DH, relayé par journal français La Dépêche du Midi. Le fonctionnaire ne nie pas : il reconnaît que c’était bien lui, dans l’avion. Mais pour sa défense, il fait valoir qu’il était bien qu’il était bel et bien au boulot : « Puisqu’il se trouvait sur le même vol, ce collègue a pu constater que j’ai travaillé dans l’avion sur mon ordinateur portable, souligne-t-il auprès de nos confrères belges. J’ai travaillé hors réseau sans être dérangé, donc plus efficacement que si j’avais télétravaillé depuis mon domicile. J’ai bien avancé pendant le vol, de même que les deux jours suivants à Porto. J’ai achevé de traiter les dossiers dans les délais. »

L’analyste, employé depuis trois ans, bénéficiait d’un accord l’autorisant télétravailler. Il devait simplement respecter certaines conditions, comme celle d’être joignable entre 9 h et midi, puis de 14 h à 16 h. Mais il était entendu que cet arrangement ne valait que s’il travaillait depuis son domicile. Clause qu’il n’a pas respectée.

Lire aussi : Télétravail, salaire, offres d’emploi… Voici les cinq métiers les plus attractifs de 2023

Tromper la hiérarchie

Après cet incident, une procédure disciplinaire a été ouverte à son encontre. « Celle-ci a abouti pour faute grave », précise La DH. La direction de l’administration belge justifie cette décision par la « malhonnêteté » de l’agent qui aurait, selon elle, « transgressé les règles applicables en matière de congé et de télétravail [et ainsi] trompé sa hiérarchie ».

Olivier Wery, avocat et spécialiste en droit du travail, s’interroge sur les conséquences de cette mésaventure. Interviewé par la chaîne de télévision belge LN24 et relayé par La DH, l’expert estime que la sanction décidée pose question : « Pour licencier quelqu’un pour faute grave, il faut que deux conditions soient réunies : que ce soit une faute intrinsèquement grave et qu’il y ait une rupture irrémédiable de confiance. Ici, une règle établie [le télétravail à domicile] et portée à la connaissance de cette personne [l’employé licencié] a été violée. Il s’agit donc d’une faute en tant que telle. Mais eu égard de son ancienneté, qu’il ne soit pas de mauvaise foi et qu’il n’y ait pas de conséquences, est-ce que c’est qu’il s’agit d’une rupture irrémédiable de confiance avec l’employeur ? C’est discutable. »

Néanmoins, le Conseil d’État belge n’est pas de cet avis et a rejeté le recours déposé par le fonctionnaire. « L’employeur, l’administration, a parfaitement pu considérer que l’attitude réfléchie adoptée par l’employé rompait définitivement le lien de confiance », justifie le Conseil d’État, souligne La DH.

Lire aussi : Comment bien choisir ses jours de télétravail ?

Un travail de « meilleure qualité » effectué dans de « meilleures conditions »

De son côté, l’analyste licencié exprime encore sa bonne foi auprès des journalistes belges et rappelle que la veille de son départ pour le Portugal, il avait travaillé jusqu’à près de minuit, bien au-delà des heures habituelles. Concernant sa charge de travail, il assure avoir travaillé dans de meilleures conditions que chez-lui, ce qui lui a permis ainsi de fournir un travail de meilleure qualité, dans les temps impartis. « Il faut que je vous dise que ce n’était pas la première fois non plus que je ne télétravaillais pas depuis mon domicile, avoue-t-il aussi. J’avais déjà procédé ainsi depuis notre maison familiale en Bretagne. »

Lire aussi : Vos souris et clavier d’ordinateur sont d’excellents indicateurs de stress, selon la science

« 32 % des Belges télétravaillent au moins une fois par semaine », souligne LN24, qui assure que ce chiffre a explosé depuis quatre ans. Face à cette nouvelle manière de travailler, amplifiée depuis la pandémie de Covid-19, les spécialistes s’interrogent sur le rapport au travail. Sur le plateau de la chaîne de télévision belge, Olivier Wery résume la problématique : « Il faut se demander ce que vise le patron comme exigence. Un carcan horaire ou le résultat ? »

Source: L'édition du soir