Teddy Riner, insubmersible, décroche sa onzième étoile mondiale en judo à un an des Jeux de Paris

May 13, 2023
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Teddy Riner, lors de sa victoire face au Japonais Tatsuru Saito aux Mondiaux de Doha (Qatar), samedi 13 mai 2023. KARIM JAAFAR / AFP

Si les titres de champion du monde de judo étaient symbolisés, comme en NBA dont il raffole, par des bagues, Teddy Riner n’aurait pas assez de ses deux mains pour arborer ses récompenses. De retour aux championnats du monde après six ans d’absence, le judoka français a décroché, samedi 13 mai, son onzième titre de champion du monde – dans la catégorie + 100 kg. A un peu plus d’un an du début des Jeux olympiques de Paris, ultime objectif de son immense carrière, le champion olympique de Londres et Rio a pris le meilleur en finale sur le Russe – combattant sous pavillon neutre – Inal Tasoev, dans l’arène de Doha (Qatar).

Si Riner a apporté la septième médaille au camp tricolore de ces Mondiaux, plus tôt dans l’après-midi, sa compatriote Julia Tolofua a décroché l’argent en + 78 kg, en s’inclinant de justesse face à la Japonaise Akira Sone, championne olympique en titre.

Venu pour se jauger sur les tatamis de Doha, Teddy Riner a obtenu ses réponses. Comme souvent depuis le début de sa carrière, l’athlète de 34 ans n’a laissé que des miettes à ses adversaires. « Ces championnats du monde vont me permettre d’aller chercher la concurrence, de me situer par rapport à cette concurrence », assurait-il avant la compétition. Avec un seul objectif, monter en puissance jusqu’au rendez-vous qu’il a coché en rouge sur son calendrier : les Jeux olympiques de Paris. « Ce que je ne veux pas, c’est arriver aux Jeux et passer à côté de cet événement », insistait-il.

Conséquence de ses longues périodes d’absence, le décuple champion du monde français n’occupait, au matin de samedi, que le 17e rang du classement mondial. Ne faisant pas partie des têtes de séries, Teddy Riner a été contraint de commencer sa journée par un tour préliminaire. « Peu importe le nombre de combats qu’il y aura à faire, l’objectif, c’est d’aller chercher les mecs, s’entraîner, parce que pour moi, même si ce sont des Mondiaux, ce sera une journée d’entraînement », énonçait le poids lourd tricolore avant de rallier Doha.

Après deux premiers tours passés sans encombre – si ce n’est un double avertissement lors de son combat initial, rapidement évacués –, le Guadeloupéen s’est frotté en huitièmes de finale au Mongol Odkhuu Tsetsentsengel. Un sacré client, âgé de 23 ans, et vainqueur en février du Grand Chelem de Tel-Aviv (Israël). Face au numéro 4 mondial mongol, Teddy Riner a été contraint de jouer les prolongations, s’imposant après trois minutes de golden score – période supplémentaire ajoutée en cas d’égalité.

Une « journée d’entraînement » sur la route des Jeux

« Se tester, ça veut dire prendre les meilleurs du moment. Et là pour le coup, ça va être le cas », observait l’entraîneur de Riner, Franck Chambily, interrogé par l’AFP vendredi. Les quarts de finale ont mis sur la route de son poulain le vice-champion du monde japonais, Tatsuru Saito. A 21 ans, le grand espoir nippon de la catégorie et fils d’Hitoshi Saito – double champion olympique en + 95 kg (1984 et 1988) – a malmené son adversaire, son aîné de treize ans. Quatre minutes supplémentaires ont été nécessaires au Français pour user et prendre le meilleur sur Tatsuru Saito.

« Ce n’est pas un tirage facile. Mais on est là pour ça, avertissait l’entraîneur tricolore. Les Jeux olympiques arrivent à grande vitesse et ça va être un très bon test. » En matière de vitesse, son protégé a accéléré en demi-finales, expédiant le Tadjik Temur Rakhimov en vingt-sept secondes. Une performance vu le parcours du décuple champion du monde, et le fait que son adversaire, envoyé au tapis sans autre forme de procès, occupe la place de numéro un mondial.

Déjà recordman absolu de couronnes mondiales, Teddy Riner n’a pas manqué l’occasion de s’en adjuger une nouvelle en finale. Opposé au Russe Inal Tasoev, réintégré comme ses compatriotes et les Biélorusses cette année à condition qu’ils concourent sous bannière neutre, le Français a pris son temps, finissant par l’emporter après près de quatre minutes de golden score, où il a frôlé la défaite.

De retour sur la scène planétaire, six ans après son dernier sacre (en 2017), Teddy Riner y a retrouvé samedi « sa » place : tout en haut. Celui qui avait été contraint de renoncer à l’édition précédente à la suite d’une blessure à la cheville, s’était fait rare sur les tatamis, mais avait repris sa marche en avant en février, en remportant – pour son retour aux affaires –, le Grand Slam de Paris. « Le vieux est toujours là, et pourvu que ça dure », assurait-il alors. A 34 ans, le « vieux » a rappelé à la concurrence que la route du titre olympique à Paris passait encore par lui. « Franchement, je me sens de mieux en mieux sur cette route qui va être encore assez longue vers les Jeux olympiques de Paris, relevait-il avant de s’envoler pour le Qatar. Je suis bien, je retrouve de belles couleurs. »

S’il avait assuré que son voyage à Doha n’était rien d’autre qu’une « journée d’entraînement » en vue des JO de Paris, celui qui multiplie les stages à l’étranger pour se préparer face à d’autres adversaires que les Français a passé une journée en or. Judoka le plus titré de l’histoire, Teddy Riner ajoute une ligne de plus à son palmarès – deux titres olympiques en individuel, un par équipes, et onze sacres mondiaux désormais. En attendant Paris, et une hypothétique troisième médaille d’or olympique en individuel comme point final de son immense carrière, Teddy Riner va pouvoir faire broder une onzième étoile dorée sur son kimono, au-dessus de son cœur.

Source: Le Monde