A Mayotte, l’Etat cherche à reprendre la main
L’Etat procède à la destruction d’habitations insalubres sur le chantier d’un futur lycée à Longoni, le 27 avril, à Mayotte. MORGAN FACHE POUR « LE MONDE »
L’opération « Wuambushu » va-t-elle se relancer ? Trois semaines après les débuts contrariés de cette opération de lutte contre les bidonvilles, la délinquance et l’immigration irrégulière à Mayotte, le gouvernement va peut-être reprendre la main.
La préfecture du 101e département français vient en tout cas de remporter, samedi 13 mai, une première victoire à la suite de deux revers stoppant le travail des pelleteuses escortées par les forces de l’ordre, dès le premier jour de l’opération. Alors que le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin avait promis la destruction de 1 000 maisons de tôle en deux mois, des recours engagés devant la justice par des habitants de bidonvilles promis à la destruction avaient fait valoir l’absence ou l’inadéquation de propositions de relogement par l’Etat, comme l’exige pourtant la loi Elan de 2018. Le tribunal administratif de La Réunion-Mayotte avait alors suspendu l’opération de démolition concernant vingt requérants du bidonville de Talus 2, à Koungou, au nord de Mamoudzou.
Samedi 13 mai, le président du tribunal administratif, Gil Cornevaux, a finalement « rabattu son ordonnance » du 27 février en raison d’éléments nouveaux mis en avant par la préfecture de Mayotte. Lors des débats, le juge des référés avait exigé des services de la Préfecture des documents tangibles pour prouver « l’existence » de ces relogements alors que certaines adresses n’existaient pas. « Je ne crois pas le préfet sur uniforme », avait lancé le magistrat.
« Pour chacune des vingt familles, nous avons produit des baux et des attestations correspondant à ces relogements qui ont été attribués en fonction de la situation de chacune d’entre elles », avaient plaidé les avocats de la Préfecture, Alain Rapady et Olivier Tamil. Une version contestée par une des représentantes des familles, Me Yseult Arnal, en citant le cas d’une femme avec quatre enfants ayant en charge ses deux parents handicapés ou encore une mère de famille de huit « qui n’a aucune garantie pour savoir si le logement est adapté ».
« Il s’agit d’une décision politique »
Dans son jugement du 13 mai, que Le Monde a pu consulter, le tribunal considère que les conditions sont finalement remplies et que « le préfet justifie d’un accompagnement social par diverses structures et associations ». Le juge des référés a toutefois exigé des garanties supplémentaires. Il enjoint ainsi au préfet de Mayotte de protéger et de stocker, après inventaire, les biens meubles des vingt familles expulsées. Il est également enjoint au préfet, au recteur de Mayotte et aux maires des communes concernées que soit assurée la scolarisation des enfants des familles concernées dans les établissements scolaires relevant du nouveau domicile des parents. « Il s’agit d’une décision politique », réagit Marjane Ghaem, l’une des avocats des familles.
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Source: Le Monde