En Thaïlande, Move Forward bouscule le jeu politique et s’impose en tête du scrutin législatif

May 15, 2023
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Pita Limjaroenrat, chef de file de Move Forward, le 15 mai 2023, à Bangkok. JACK TAYLOR / AFP

L’atmosphère était électrique, dimanche 14 mai, vers 23 heures, au siège du parti Move Forward (« aller de l’avant »), un petit immeuble aux grandes baies vitrées, dans l’est de Bangkok, où se pressaient journalistes, personnel de campagne et supporteurs, et pas seulement en raison du climat orageux. En terminant en tête des législatives, avec 151 sièges, tout près de son score maximal espéré, cette jeune formation prodémocratie fait une entrée fracassante dans le paysage politique thaïlandais. Soixante-quinze pour cent des Thaïlandais se sont rendus aux urnes pour le scrutin.

Pourtant, quand le candidat du parti au poste de premier ministre, Pita Limjaroenrat, dit « Pita » (les Thaïlandais se désignent par leur prénom), 42 ans, est sorti dans la cohue des partisans, aux cris de « na-yok ! na-yok ! » (premier ministre), rien dans le reste de Bangkok assoupie et silencieuse – ni drapeaux ni cris de joie – ne pouvait laisser deviner que la quasi-totalité des sièges de député de l’immense capitale et de sa banlieue venaient de virer, ce soir-là, à l’orange, la couleur du Move Forward.

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Sage Thaïlande, qui retient son souffle : les forces dites « démocratiques », c’est-à-dire le parti Move Forward et le Pheu Thai (« Pour les Thaïlandais »), la formation politique liée à la famille de l’ancien premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, arrivée en deuxième position avec 141 sièges, rassemblent, certes avec plusieurs petits partis alliés, entre 60 % et 65 % des 500 sièges de l’Assemblée législative. Mais le pouvoir en place, issu du putsch militaire de 2014 et soutenu par le palais royal, a par le passé usé et abusé de son emprise sur les institutions pour disqualifier des partis ou leurs dirigeants. Surtout, l’élection du chef du gouvernement n’est pas uniquement le résultat du vote des 500 députés nouvellement élus : s’y ajoute celui de 250 sénateurs nommés par l’ancienne junte militaire, en 2017, dont le mandat n’expire qu’en 2024 – ce qui place la barre à 376 sièges, Sénat et Assemblée confondus, pour faire triompher un candidat au poste de premier ministre.

Les regards se portent donc vers la troisième formation du scrutin, celle du ministre de la santé sortant et artisan de la dépénalisation controversée du cannabis, Anutin Charnvirakul (70 sièges) : son rôle pourrait être déterminant selon qu’il décide de s’allier à l’un ou à l’autre des deux camps. La gifle infligée par les électeurs aux généraux putschistes au pouvoir – le premier ministre sortant, le général Prayuth Chan-o-cha, arrive en cinquième position du scrutin, et son vice-premier ministre, le général Prawit Wongsuwan, arrivé quatrième sous les couleurs d’un parti différent – ne les élimine pas encore du champ politique.

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Source: Le Monde