Mohammed ben Salman en France: "les Occidentaux restent silencieux face à l'Arabie Saoudite"
Entretien
Mohammed ben Salman, le prince héritier d'Arabie Saoudite et homme fort du royaume, est à Paris. Il déjeune ce vendredi 16 juin à l'Élysée avec Emmanuel Macron. Au menu de leurs échanges, il y a les grands dossiers internationaux (Ukraine, Liban...) et les échanges économiques entre Paris et Riyad. Lina al-Athloul, chargée de plaidoyer pour ALQST, une ONG saoudienne en exil, revient sur les enjeux de cette visite en matière de Droits humains.
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C'est la deuxième visite de Mohammed ben Salman en moins d'un an à Paris, chaleureusement accueilli malgré un sombre bilan dans ce domaine avec notamment de l'assassinat en 2018 à Istanbul du journaliste et opposant saoudien Jamal Khashoggi, très critique du pouvoir de MBS. Le royaume est aussi l'un des pays qui applique le plus la peine de mort -196 exécution en 2022, selon Amnesty International.
RFI : Quels sont les sujets dont Emmanuel Macron devrait parler avec Mohammed ben Salman ?
Lina al-Athloul : Les exécutions capitales en Arabie Saoudite, y compris celles de mineurs au moment des faits. Et aussi les condamnations à mort de membres de la tribu des Howeitat, qui habitaient dans la région de Neom, ce méga-projet de ville futuriste que Mohammed ben Salman est en train de développer. Ce sont des Saoudiens qui vont se faire couper la tête pour avoir refusé de laisser la place à un projet de MBS. Et ce, avec la complicité de société française. Car lorsqu’on participe au projet Neom sans parler ces condamnations, je pense qu’on est indirectement complice.
Selon vous, pourquoi les pays occidentaux hésitent-ils à évoquer frontalement la question des Droits humains en Arabie Saoudite ? En raison du poids des échanges commerciaux ?
Ils restent silencieux en se disant que s’ils agacent les Saoudiens avec ces sujets, ils se tourneront vers la Chine. Au final, que se passe-t-il ? Tout le monde reste silencieux sur les violations des Droits humains en Arabie Saoudite mais les Saoudiens se tournent quand même vers la Chine !
Votre sœur, Loujain al-Athloul, a été arrêtée et condamnée alors qu’elle demandait des droits pour les Saoudiennes. Elle a passé près de trois ans en prison, mais ne peut toujours pas quitter l’Arabie Saoudite. Quelle est sa situation ?
Depuis 2018, ma sœur Loujain et toute ma famille vivent sous le coup d’une interdiction de quitter le territoire saoudien. Cela n’est pas notifié officiellement et cela provoque une peur constante. C’est une sorte de menace, qui vise à les museler, à empêcher qu’ils parlent de la situation de Loujain. Si je retournais en Arabie Saoudite, je ne pourrais plus en partir. Mais ce n’est pas une exception, c’est le cas de beaucoup de Saoudiens et la situation de tous les activistes visés par une interdiction de sortie du territoire, c’est vraiment un État policier.
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Source: RFI